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rafisa

Roumanie



4000kms parcourus, une frontière, des champs de tournesols et de maïs et nous voici en Roumanie. Les douaniers Roumains ayant envie d'une petite visite de camping-car ils feront le tour de Mano avant de nous laisser passer. Nous arrivons dans un pays en "construction" des travaux partout, les routes sont en travaux (" Drum in lucru "), les maisons aussi, c'est un vrai bazar. Quel bonheur de se retrouver dans un pays si vivant. Les tracteurs, les chevaux, les charrettes, les piétons, les vélos, camions, bus, voitures...s'entremêlent sur des routes défoncées au bord desquelles les étals de pastèques s'alignent.

Nous voilà sur des routes sans panneaux, nous nous engageons sur des chemins qui ne mènent nulle part et nous nous retrouvons dans des ruelles où nous ne sommes pas sûrs de passer sous les fils électriques emmêlés ou bien entre les arbres. Nous arrivons tout compte fait dans les Maramures, où un petit village retient notre attention. Des maisons de bois sculptées, des portails magnifiques, des jardins, une odeur de feu de bois, il n'en faut pas plus aux rafisamalu pour s'arrêter. Nous demandons à une mamie qui tient un café s'il est possible de dormir dans sa cour, elle dit qu'il n'y a pas de soucis, nous nous garons et allons faire un petit tour du village, histoire de se dégourdir les jambes.

La journée a été longue, départ de Hortobagy à 10h,arrivée à 18h. Une petite bière "URSUS" pour se réhydrater, Héléna : esta bueno ? Oui parfait. Deux minutes plus tard Isa se retrouve dans la cuisine un couteau à la main en train d'éplucher des pommes de terre, Héléna sort une poêle et la donne à Isa, "ok je fais la cuisine". Isa met alors de l'eau à bouillir pour cuire les quelques saucisses trouvées dans le réfrigérateur, de l'huile dans la poêle et c'est parti pour des chips. Héléna revient avec du fromage de vache frais (le sien). Il est excellent, surtout avec un petit peu de miel du coin. Mathis fait la grimace, mais goûte, lunagaïa pareil, ah c'est bien les voyages. demande si nous voulons manger, "si", des pommes de terres avec des oignons des tomates..

Les enfants découvrent la vie autrement. Il faut manger quand c'est possible et ce qu'il y a. Pas question de faire le difficile ou de refuser ce que les gens nous offre. Au bout de 5 semaines ils mangent des salades (avant, ils détestaient ce qui était froid), de la viande tous les 4 ou 5 jours en fonction de ce que l'on trouve et ils goûtent. Bref le voyage commence.

Nous mettons tout ça sur la table dehors et nous mangeons tranquilles, enfin presque...tout le village défile dans la petite cour pour voir ces français qui voyagent avec leur maison. Nous ferons la causette en français, anglais, espagnol, un peu de roumain... Les enfants sont ravis, ils jouent dans la cour, trouvent que la maison est petite (1 pièce) Lunagaïa se demande comment ils font pour rentrer le sapin de Noël dans une maison aussi petite... Ils découvriront les toilettes au fond du jardin où il faut passer devant le chien, pour arriver dans une cabane qui ne sent pas bon du tout, avec un trou au milieu et où les garçons font pipi sur la planche de bois, donc nous en avons plein les pieds.

Le voyage commence, Isa est aux anges : enfin un pays bien en foutoir comme elle les aime, avec des gens qui rient, qui crient, qui chantent, un pays à odeur, un pays où on se touche (Héléna prend les enfants et Isa dans ses bras), bref un pays où on vit. Le soir c'est la fête : nous nous couchons au son de l'accordéon et des chants roumains... Le paradis des rafisamalu. Et oui l'instinct du voyageur ça ne s'explique pas, un 6 ème sens apparaît au fur et à mesure des voyages et le voyageur sait quand ça va être bien. Et là c'était très bien!

Petite description de l'endroit où nous sommes: La région des Maramures a vécu quasiment en autarcie, fondée sur 3 ressources : une agriculture riche permettant l'autoconsommation, l'exploitation du bois et la mine. C'est un pays de collines douces, de bois, de champs, de meules de foin, de charrettes, de chevaux à pompons, de rivières... Les maisons de bois sculptées sont superbes. L'espace est défini selon son utilité. La maison d'habitation est en bois, avec des poutres horizontales, un toit à 4 pentes, une galerie-balcon jalonnée de piliers sculptés. La maison dispose de 2 pièces, celle où l'on vit et celle où l'on reçoit (ou tout dans la même pièce). Un canapé, avec une grosse couverture de laine, une gazinière, un évier, une table, 2 ou 3 meubles, des tapis. L'extérieur de la maison est sculpté de motifs géométriques stylisés autour des fenêtres et des portes, toutes ces représentations sont issues de la religion chrétienne, mais représente aussi l'arbre de vie (cordes et noeuds), la rosette symbolise le soleil. Après la maison vient l'écurie (pour les animaux : chevaux, poules, vaches...) et la charrette, puis la grange pour le foin, les sacs de grains et les ustensiles pour travailler dans les champs, le puits, tout ceci autour d'une cour herbeuse où peuvent batifoler les enfants tout comme les animaux. Le portail est tout aussi travaillé que le reste des habitations. Sans oublier le banc devant la maison, indispensable à la vie sur le goudron.

Le lendemain matin après la visite de toute la famille et le petit-déjeuner avec le lait de vache tout frais, Isa se retrouve propulsée dans le salon de la maison d'à côté, habillée à la maramure en 2 temps 3 mouvements : 2 jupons, un haut en cotonnade épaisse avec des broderies, un gilet brodé en peau de mouton et un fichu sur la tête, pareil pour lunagaïa. Héléna rit de bon cœur. Toute la famille est aux anges, les rencontres sont vraiment notre moteur. Après les adieux d'usage nous reprenons le goudron pour la route des monastères...


Nous sortons des Maramures pour entrer en Bucovine. La Bucovine est la partie nord-ouest de la Moldavie "la terre d'en haut", ce nom est d'origine slave et veut dire hêtre. C'est une terre de brassage de peuples : Roumains, juifs, ukrainiens, Polonais, Roms, allemands, Ruthènes, Hongrois, Arméniens,... Elle était donc un grand centre culturel de l'Europe centrale.

Cette région est maintenant plus connue pour ses monastères aux allures de châteaux forts. Les premières églises étaient en bois, puis en pierre. Le règne d'Etienne le grand a vu apparaître le style Moldave avec ses tri-conques (forme de trèfle) : une église allongée, avec un toit en forme de trèfle très ample qui protège les peintures extérieures. Tous ces monastères appartiennent à la religion Orthodoxe, qui ne compte pas d'ordre, mais plutôt une société monastique très souple qui peut varier d'un monastère à l'autre. Tout repose sur la tradition d'Hésychate : paix, silence, quiétude, ou l'art de la prière perpétuelle.

Le monastère de Moldavita nous accueille le lendemain matin avec le sourire, des bonbons pour les enfants et nous repartons pour le monastère de Suscevita. La fresque qui orne la façade est la plus riche de tous les monuments Moldaves. Nous sommes étonnés par le nombre de jeunes filles nones que nous croisons dans les monastères. La réponse est simple, le fait de "donner" une fille au monastère, existe encore. En échange le monastère nourrit la famille.

L'échelle des vertus : C'est un moine retiré dans le désert du Sinaï au VIe siècle qui a composé les 32 chapitres . Une échelle que l'on doit gravir après la mort avec son ange gardien. Chaque degré représente une vertu. Seul celui qui n'a jamais péché arrive au sommet, sinon c'est l'enfer.

Le monastère de Putna est habité par des hommes. La tête d’aurochs symbole de la Moldavie trône sur la pierre funéraire d'Etienne le grand, au même titre que les glands et les feuilles de chênes qui symbolisent la puissance. Cette église est en réfection et les peintures sont vraiment splendides.

Pour changer des monastères nous irons dans un cimetière. Celui de Sapanta, qui est le "cimetière joyeux". Un sculpteur Ion Stan Patras à sculpté les croix de chaque défunt. Chaque tombe est fleurie, mais la croix d'un bleu profond, travaillée aux ciseaux et aux couleurs flamboyantes donne du tonus et de la joie à ce cimetière. Telle paysanne est croquée filant la laine, tel homme est immortalisé gardant ses vaches,...tout le village est "passé sous les ciseaux à bois " de Patras pendant 40 ans. Aujourd'hui son apprenti prend la suite...alors à suivre...

Dans tous les monastères vous trouverez des œufs décorés. Cette tradition Houtsoules (Slovaphones de Bucovine) est un art de la patience. Il faut vider, puis sécher les œufs avant de "les écrire". Le décor est en fonction de l'inspiration du moment. La couleur est faite par application successives de couches de cire, pour délimiter les parties à peindre ou non. Un œuf représente environ 4h de travail.

L'artisanat est encore riche, mais en mutation, certaines activités disparaissent. La broderie, mais surtout les icônes de verre qui sont un art populaire. Il est imprégné par le mystique orthodoxe riche de couleurs vives et de scènes de la vie quotidienne : paysages, paysans, fleurs, costumes, travail des champs....

Nous sommes descendus dans la mine de sel de Cacica. Elle est en service depuis 1791 et est toujours en exploitation. Avant de descendre l'escalier, une odeur de gas-oil vous prend à la gorge et au nez. Vous descendez à -27m par un escalier glissant, fossilisé par le sel et noir de gasoil (la polaire de Mathis en est la preuve !). Là vous découvrez la chapelle de Sainte Barbara (protectrice des mineurs) creusée dans le sel et utilisée par les Chrétiens Polonais tout comme par les orthodoxes. A -45m nous débouchons sur une salle de bal ou de sport construite en 1905. A la surface une piscine d'eau salée fait le bonheur des habitants de la région qui viennent y flotter le dimanche. Les villages de Botosana et de Poieni Solca nous ont laissé sous le charme d'une vie de campagne rude mais riche de moutons, d'arbres fruitiers et de rencontres. Nous descendrons plus bas encore aujourd'hui, en allant dans les gorges du Bicaz. La route serpente au milieu des gorges resserrées et grandioses. La caméra est évidemment tombée en panne à ce moment-là alors raté pour les images.

Petit aparté sur LA voiture que vous croisez tous les 100m sur ces routes "in lucru" : La Dacia 1300.

C'est la voiture roumaine par excellence, la Dacia est partout et de toutes les formes. Le choix des Roumains s'étant porté sur le prototype de la Renault 12 (la fameuse R12 avec les bandes à la starsky et Hutch et la moquette sur le volant). En 1968 la première Dacia 1100 sortie des usines Roumaines, puis en 1969 la Dacia 1300 sur le modèle de la R12. Elle fut décliné en familiale, pick-up, break et des améliorations toutes personnelles. Depuis peu avec la Logan, Renault ouvre une possibilité à Dacia une carrière internationale, c'est David qui va bouffer Goliath, achetez Roumain, c'est du costaud!

Nous continuons nos boucles vers le Sud, faisons une bise à Vlad Tespes le célébrissime " Dracul " (le dragon ou le diable en vieux roumain qui terrassa les ottomans et finit décapité) dans sa ville natale de Sigisoara et trouvons refuge dans le petit village de Birtain ou le temps semble s'être arrêté. La postière, très fière me donne un journal dont la "UNE" traite de l'inscription récente de Birtain au patrimoine mondial de l'Unesco.

Cette partie Centre-Sud de la Roumanie, bien que très belle et très riche, ne nous charme pas autant que les précédentes. Nous regrettons parfois de ne pas être restés plus longtemps dans les maramures chez Helena. Nous visitons la ville de Sibiu et son village musée et terminons notre journée au beau milieu d'un marché tenu par des Roms à 3 minutes du château de Bran qui inspira à l'Irlandais Bram Stocker l'histoire du compte Dracula. Mathis et Lunagaïa fantasment... nous croquons quelques gousses d'ail avant d'aller au lit, par sécurité, :-D

Le marché, tenu par les Roms, se termine quand nous arrivons, ils paraissent inquiets en nous voyant nous garer et nous nous demandons pourquoi. Un papy prépare des petits tas de cailloux et nous sommes intrigués. Nous comprenons alors que nous sommes sur la place qu'ils occupent pendant la journée. Sourires et langage des signes, ils se marrent autant que nous. Nous bougeons Mano dans un coin du marché et observons nos voisins préparer leur abris de fortune pour passer la nuit. Cet épisode nous permet de vous présenter les Roms et ce que nous avons pu observer durant notre parcours.

Les Roms représentent officiellement 410 000 personnes, ils sont en fait entre 2 et 4 millions d'individus. La plupart des Roms lors des recensements se déclarent hongrois...par soucis d'intégration, mais aussi par "honte" de leur statut de tziganes. Les Roms parlent le romani une langue dérivée du sanskrit. Originaires d'Inde, ils sont arrivés vers l'an 1000 en Europe après avoir traversé l'Iranet la Turquie. Le terme de tzigane fut pendant 5 siècles synonyme d'esclave alors que le terme de Rom veut dire "homme" en Romani. Cette langue, reconnue en Roumanie, est enseignée à l'université au même titre que le hongrois. Parmi les Roms 1/3 d'entre eux vivent en nomades et restent fidèles à leurs traditions. D'autres sont semi-nomades et campent l'été. La "tribu" la plus connue est celle des "caldarari"(les chaudronnier). Nous avons trouvé que le décalage entre Roms et Hongrois/Slovaques/Roumains est énorme, un réel fossé. Les Roumains disent facilement de faire attention aux Roms (voleurs...) alors qu'ils sont riches d'une tradition ancestrale qui se perd. La sédentarisation, l'isolement culturel, le manque de tolérance, le manque de travail enfonce ce peuple dans la pauvreté (la "pauvritude"), avec tous ses corollaires. Nous avons souvent constaté que les tâches les plus difficiles et les "moins nobles" sont réservées aux Roms. Les maisons les plus délabrées sont les leurs. Ils sont logés proche des usines ou à côté des rivières et sont les premiers à être inondés ou loin des villages dans de véritables taudis. On les retrouve cependant dans toutes les tranches de la société et ils prennent leur destin en mains au travers d'associations très actives souvent dirigées par des femmes. Ces dernières sont comme dans toutes les communautés les initiatrices du changement, de l'adaptation et de l'émancipation culturelle qui se veut double.

Au réveil, nos voisins se réchauffent en buvant un café avant de préparer leurs étals. Nous nous saluons et repartons sur les belles routes montagneuses de la Transylvanie. Ce pays nous aura littéralement charmé, c'est notre coup de cœur et nous vous recommandons vivement de venir découvrir cet endroit, en vous souhaitant un aussi bonne météo que celle dont nous avons bénéficié.


Portrait d'Héléna : Elle nous accueille avec le sourire et nous met en confiance pour le reste du voyage en Roumanie. Elle a 62 ans, elle est au milieu d'une fratrie de 12 ou 13 frères et sœurs, et travaille dur.

Pour améliorer le quotidien elle fait des voyages fréquents en France ou en Espagne comme saisonnière. Elle se transforme alors en cueilleuse de fruits ou de légumes en Espagne, puis en vendangeuse en France dès le mois de septembre. Avec cet apport d'argent elle a pu construire une maison à côté de la sienne, pour accueillir des touristes, qui viennent marcher sur les magnifiques chemins des Maramures. Elle tient également une petite épicerie, bar café, où les travailleurs se retrouvent le soir ainsi que les jeunes le week end, devant une bonne bière. L'ambiance est sympathique, et chaleureuse. Nous avons campé dans la cour une nuit, et nous regrettons de ne pas y être restés plus longtemps.




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